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La réouverture, ou non des universités, le mal-être des étudiants, les drames même, mais aussi la souffrance des enseignants-chercheurs sont des questions évidemment majeures. Mais je m’attache aujourd’hui à une chose insignifiante qui n’aura aucune influence sur l’Université et la science de demain, sur le profil de ses chercheurs/euses ou encore sur l’innovation : la descente aux enfers des compétences mathématiques des élèves français. L’étude TIMMS n’a soulevé que des réactions convenues. Il est vrai qu’il n’y a pas de coupable étranger (Gafa, multinationales, réseaux sociaux etc.) mais seulement l’accumulation des errements du système éducatif français depuis des décennies. Mais paradoxalement, dans notre système hyper élitiste, le fait que les « bons » soient de moins en moins nombreux pourrait être l’occasion de faire bouger les lignes.

Les médailles Fields sont l’arbre qui cache la forêt, un peu comme les succès de Teddy Riner masquent l’effondrement du nombre de licenciés de judo. Et contrairement à ce que croit C. Villani, la bonne tenue française en terme d’élite mathématique ne nous préserve pas. Les mésaventures Sanofi-Institut Pasteur sur le vaccin de la COVID-19 peuvent être méditées ! Il ne suffit pas de s’autoproclamer fleuron de la recherche face à la compétition internationale… Oui il faut des moyens pour la science, pour les labos, pour les universités. Mais il faut d’abord et aussi des jeunes bien formés.

Or, après les résultats TIMMS en décembre dernier, je m’attendais à une mobilisation générale sur une cause potentiellement « consensuelle ». Et bien, quasiment rien, à part pendant quelques jours les réactions « classiques ». La faute à la crise sanitaire ? Pas vraiment !

Les enseignants-chercheurs se livrent à une bataille homérique sur le CNU, le gouvernement annonce officiellement de nouveaux « investissements d’avenir » avec le PIA 4, des recours contentieux sur le HCERES sont déposés etc., bref la routine. Car si la situation actuelle des étudiants est préoccupante (mais je pense, rattrapable), celle des écoliers, collégiens et lycéens en termes de compétences, les futurs étudiants, l’est encore plus. Il y a une sorte de « fatalisme » autour de cette dégradation lente, voire une indifférence motivée par un « nous ne serons pas touchés »…

Seule voix dans ce silence, une tribune parue pendant les vacances de décembre dans le Monde, courageuse et clairvoyante signée de Martin Andler (Professeur de mathématiques émérite à l’université de Versailles-Saint-Quentin) et Vanessa Wisnia-Weill (Sociologue). Alors que la France figure au dernier rang dans les pays de l’Union européenne, les auteurs de la tribune tentent de réveiller nos villages universitaires gaulois à propos d' »une vérité taboue dont on n’a collectivement pas assez pris la mesure. »

Si je suis plutôt de naturel optimiste et n’adhère pas aux théories dites « déclinistes » du ‘tout était mieux avant’, je dois dire que l’accumulation d’études négatives sur le niveau scolaire des élèves a franchi un cap. Je n’aurai pas la cruauté de rappeler les réactions à propos des premières études PISA dès 2000, illustration d’une xénophobie rampante déguisée en défense du modèle français. Comme tout ce qui vient de l’étranger est suspect, cette cécité s’est appuyée sur cette vanité bien de chez nous qu’illustre cette crispation sur les CPGE supposées être l’incarnation du génie français que le monde entier nous envie. Sans doute comme le minitel face à internet ou France TV face à Netflix… Le problème c’est que le génie français, y compris en CPGE, a du plomb dans l’aile !

De « futures élites » mathématiques en sursis ?

Les enquêtes internationales, contrairement à l’Allemagne, ont toujours été accueillies chez nous avec l’indifférence d’un système qui n’existe en réalité que pour les supposés « meilleurs ». Tant qu’il produit des +++, tant qu’il alimente les CPGE, surtout Henri IV, Louis le Grand, Ginette et quelques autres, tant qu’il fournit aux universitaires des thésards de haut niveau, pourquoi se préoccuper des « moyens et mauvais » ?

Et bien justement, malheureusement ou heureusement, pour la première fois sont en cause les « bons » élèves, qui le sont de moins en moins, et qui sont de moins en moins nombreux ! Sera-ce une raison suffisante pour une prise de conscience ? Car si tout notre système vit sur ce terreau de la sélection d’une élite découplée de la masse (j’ai déjà abordé cette question, sous l’angle du sport de haut niveau), la lecture des résultats français de l’étude PISA sur la compréhension de l’écrit, qui concerne des élèves de 15 ans, est préoccupante sur une série d’items mais carrément désastreuse avec l’étude TIMMS pour les maths et les sciences. Or après le lycée, il y a l’enseignement supérieur…

Que dit l’enquête TIMMS sur les maths et les sciences ?

La dernière enquête internationale Timss 1Trends in International Mathematics and Science Study a été réalisée en mai 2019 sur un échantillon de 4 186 enfants de CM1 et 3 874 adolescents de 4ème. marque une rupture. Dans leur tribune du Monde, Martin Andler et Vanessa Wisnia-Weill soulignent que les résultats « ne nous redisent pas seulement les faits bien connus du débat public et qui focalisent l’attention : performance médiocre des élèves français, baisse du niveau depuis vingt ans, poids des inégalités sociales à l’école et nombre élevé d’élèves en échec. »  Désormais, il y a de moins en moins de « bons » élèves.

Ils poursuivent : « en mathématiques et en sciences, nos bons élèves ne sont pas si bons, et certainement pas assez nombreux à l’être. Les résultats Timss sont plus précis : seulement 3 % de nos CM1 sont très bons. En 4e, 2 % sont très bons contre 11 % des Anglais, 14 % des Américains (et 51 % des Singapouriens). A cet étiage, il ne s’agit plus de médiocrité mais de déclassement général des jeunes Français, et pas seulement de sous-investissements dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (même s’ils sont évidemment plus que jamais nécessaires) ou d’une insuffisante mixité sociale. La réalité statistique est impitoyable : même les 50 % d’écoles sur les territoires les plus favorisés, n’arrivent pas à former 5 % d’élèves de bon niveau !

Martin Andler soulignait dès 2014 que si « les horaires ont incontestablement diminué au lycée depuis 1995 », au collège « ils restent élevés par rapport à d’autres pays. Les mathématiques représentent 15% du temps d’enseignement en France, contre 12% en moyenne dans l’OCDE. Ce n’est pas qu’une question de quantité. Car dans notre collège « les mathématiques sont enseignées de façon à préparer au lycée et à l’université. » Pire, « si on pousse le trait, le programme en 6e est conçu en fonction de Polytechnique ! Dans de nombreux pays, l’enseignement est moins ambitieux sur le papier, mais parfois plus riche de sens. » Et si les enseignants mettent souvent en cause la réduction des horaires, c’est qu’ils ont « l’impression d’une course contre la montre, avec des programmes lourds sur un temps restreint. Du coup, ils donnent la priorité à l’assimilation des règles au détriment du travail sur le sens. »

Des changements incessants de programme

Toujours aussi lourds, il y a les changements incessants de programme 2 Ça ne date pas d’hier ! Je peux livrer un témoignage personnel sur les maths : en classe de 3è dans les années 70, plutôt excellent en maths, j’ai vécu l’introduction des maths dites « modernes » qui m’ont fait plonger dans les abysses de la médiocrité puis du blocage psychologique. Et mon prof semblait totalement démuni devant le changement de programme opéré.. M. Andler et V. Wisnia-Weill évoquent cet aspect : « Sans remettre en question la réforme du lycée, inclure des mathématiques dans les matières obligatoires s’impose sauf à continuer d’avoir des professeurs ayant arrêté prématurément les mathématiques. D’autres points relèvent des universités. Par exemple, les étudiants en lettres et sciences humaines devraient pouvoir acquérir, au sein de leur parcours de licence, la formation scientifique dont ils auront besoin pour le professorat des écoles. » Cédric Villani estime de son côté qu’avec les nouveaux cours d’informatique, « finalement, au lycée, on fera plus de mathématiques qu’aujourd’hui. »

Sébastien Planchenault, président de l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public, interrogé par AEF info en décembre 2020, rejoignait M. Andler et V. Wisnia-Weill, pour « des programmes cohérents avec le monde dans lequel on vit et des programmes allégés pour qu’ils soient mieux enseignés », c’est à dire « moins de choses mais mieux enseignées plutôt que beaucoup mais saupoudré ».  Il soulignait également que les résultats de l’étude sont « liés aux changements réguliers de politique et de vision de l’éducation ». Ainsi, il oppose à la comparaison des résultats obtenus entre 1995 et 2019 chez les élèves de 4ème « plusieurs réformes, révisions des pratiques et remises en cause des méthodes » intervenues sur la période. « On ne nous laisse pas le temps pour avoir une analyse distanciée de ce qu’on fait et on manque de stabilité pour avoir une analyse réflective sur nos façons de faire », déplorait-il.

Le problème de la formation des enseignants français

Dès 1972, lors de sa première conférence de presse, la CPU mettait cette question de la formation des enseignants à l’ordre du jour comme une priorité ! Il faudrait être de mauvaise foi pour faire de JM Blanquer le coupable d’un problème qui dure…depuis 50 ans. Ne comptez pas sur moi pour délivrer un oracle sur la formation des enseignants : je finis par n’y plus rien comprendre avec la succession des IUFM, Espé, Inspé, de la place du concours etc…

Mais une enquête de la Depp (française celle-ci, donc inattaquable 😀) nous donne à réfléchir. Loin des polémiques enflammées sur la supposée dictature du ‘pédagogisme’, les pratiques des enseignants français sont au contraire très traditionnelles. En effet, la pratique dominante reste l’enseignement façon cours magistral, l’enseignant expliquant les objectifs de son cours et vérifiant la compréhension des élèves. Ils sont par ailleurs « peu formés à l’enseignement des compétences transversales », moins d’un quart exprimant « une grande capacité à aider les élèves à développer leur esprit critique ».

Et si la réussite de tous les élèves est considérée comme essentielle, les professeurs font moins l’effort d’adapter leur enseignement face aux classes les plus difficiles. Avec un risque, celui « d’accroître encore les inégalités scolaires » souligne la Depp. Quant au numérique, l’étude réalisée avant la crise sanitaire souligne que son utilisation pédagogique  est jugée peu prioritaire et peu faisable… En résumé, outre des enseignants mal formés, des changements incessants de programme, on a toujours un type d’enseignement et une culture pédagogique verticales, en décalage avec les jeunes d’aujourd’hui. L’historien Marc Bloch a écrit il y a  bien longtemps de belles pages sur cette question de l’enseignement et décrit des maux dont les racines sont profondes dans notre pays.

Car que nous dit la dernière étude PISA ? Elle met en lumière les défauts spécifiques du système français. Il y a le constat largement documenté par la recherche, que la France est un pays dans lequel l’origine sociale compte le plus dans la performance des élèves, un des pays les plus inégalitaires. Mais surtout, la France est l’un des pays où les élèves « ressentent le moins de soutien de la part de leurs enseignants pour progresser dans les apprentissages. Ainsi, moins d’un élève sur quatre en France (un sur trois, en moyenne dans les pays de l’OCDE) déclare que son professeur lui indique ses points forts. » Et la bienveillance n’est visiblement pas au programme : moins de 2 élèves sur 5 en France, contre 1 sur 2 en moyenne dans les pays de l’OCDE, « déclarent que leur professeur leur indique souvent ou toujours comment améliorer leurs résultats. » 🤔

Ajoutons d’autres constats (moins d’ambitions chez les élèves issus de milieux défavorisés, la France, quasiment championne du bruit en classe) et nous avons un système qui « produit » des élèves en manque de confiance. On y souligne plus les points faibles qu’on ne valorise les points forts : c’est le mal de la pédagogie à la française. Et l’on sait bien que cette vision essaime dans le supérieur !

Un bilan alarmant

En résumé, le résultat c’est que « la performance moyenne en compréhension de l’écrit en France n’a pas évolué de manière sensible depuis la première édition du test PISA en 2000. De même, les performances moyennes en sciences n’ont pas connu d’évolution notable entre 2006 (la première fois que la science a été évaluée dans le domaine principal) et 2018. Les résultats moyens en mathématiques ont diminué entre 2003 et 2018, mais la plus grande partie de cette baisse a été observée entre 2003 et 2006, les résultats étant pratiquement identiques sur toutes les évaluations entre 2006 et 2018.

Et en compréhension de l’écrit, « la stabilité apparente de la performance sur la période 2000-2018 masque des évolutions divergentes selon les élèves. Alors que le niveau des meilleurs élèves a eu tendance à augmenter sur la période, celles des élèves les plus faibles a au contraire baissé. Cependant, l’essentiel de ces évolutions se sont produites de 2000 à 2009. Ce creusement des écarts ne s’observe ni en mathématiques (où la baisse de performance sur la période s’observe à la fois pour les meilleurs élèves et les plus faibles) ni en sciences. »

Bien sûr il y a le plan Torossian-Villani ou encore les initiatives d’Animath. Il faudra également observer les effets de toute une série de mesures. Mais, globalement, au-delà des querelles politiques que l’Histoire nous apprend à relativiser, l’éducation nationale semble demeurer une boite noire insensible à ses propres résultats.

Les conséquences pour l’enseignement supérieur et la recherche

Pourtant, il y a les conséquences de cette baisse des compétences scientifiques pour les jeunes et pour notre pays. Cela interroge à nouveau sur cette manie française de spécialiser très-trop tôt. Bien sûr, il y a heureusement d’autres compétences chez les jeunes et chez les étudiants : mais les lacunes relevées par PISA et TIMMS témoignent d’une forme d’amputation intellectuelle à l’heure où la polyvalence des compétences dans une société numérisée, technologique est une nécessité. Cela est aussi vrai chez les étudiants en santé, en maths, en physique etc. : un minimum de connaissance de l’histoire ou de la compréhension du sens des mots, par exemple, n’est pas un luxe.

Car quelle que soit la discipline choisie dans l’enseignement supérieur, l’arrivée d’étudiants n’ayant pas acquis certains fondamentaux est une menace pour le système d’enseignement supérieur et le pays. Que faire ? Je n’ai évidemment pas de solution magique mais M. Andler et V. Wisnia-Weill chiffrent à 500 M€ le besoin :

  • pour organiser des stages de formation des enseignants pendant les vacances en indemnisant les participants,
  • pour utiliser les outils en ligne pour fournir exercices et activités gradués par niveaux,
  • pour faire appel à des professeurs de mathématiques, ingénieurs, étudiants avancés et médiateurs scientifiques expérimentés,
  • pour intervenir aux côtés des professeurs des écoles partout en France.

J’ajouterai une remarque : il est toujours étonnant de voir en permanence la communauté scientifique lancer des appels à vulgariser, à faire de la médiation scientifique alors qu’une partie d’entre elle n’enseigne jamais ! N’est-ce pas pourtant un sujet essentiel avant le tarissement de la source ? Former les futurs enseignants, former les étudiants, c’est le quotidien de l’immense majorité des chercheurs/euses du monde entier.

Références

Références
1 Trends in International Mathematics and Science Study a été réalisée en mai 2019 sur un échantillon de 4 186 enfants de CM1 et 3 874 adolescents de 4ème.
2 Ça ne date pas d’hier ! Je peux livrer un témoignage personnel sur les maths : en classe de 3è dans les années 70, plutôt excellent en maths, j’ai vécu l’introduction des maths dites « modernes » qui m’ont fait plonger dans les abysses de la médiocrité puis du blocage psychologique. Et mon prof semblait totalement démuni devant le changement de programme opéré.

8 Responses to “Maths : des « bons » de moins en moins nombreux, what else ?”

  1. Les sujets sont effectivement celui de la formation initiale et continue des enseignants, le contenu des programmes et l’objectif premier (former une élite restreinte ou une population significative d’élèves). Les traiter suppose de franchir les obstacles de tous les conservatismes

  2. C’est exactement cela: tous les conservatismes à renverser d’un coup. Un concentré d’actions quasi impossibles.
    Merci Jean Michel et Jean Luc pour cette entrée explosive dans la nouvelle année que je vous souhaite la meilleure possible!

  3. Pas tout à fait d’accord, Bernard : oui, il faut renverser les conservatismes. Mais si on reste dans un système démocratique, hypothèse souhaitable, et si chaque ministre arrive avec « sa » réforme, qu’ il veut les mettre en place vite, au gré des changements de ministre et des alternances politiques, on fait des réformes trop souvent, on ballote les enseignants (cf l’exemple choisi par Jean-Michel des maths modernes), et même les bonnes réformes ne donnent pas de bons résultats.

  4. Laurent Lafforgue a écrit des choses intéressantes à ce sujet il y a quelques années et après ? Triste de constater que des personnes imminentes, depuis des années dressent un constat alarmant et rien ne s’améliore.

    Au delà des méthodes pédagogiques, des formations des enseignants c’est certainement plus un problème de société, un problème politique.

    On nous parle de la méthode de Singapour, très bien. J’ai vu un reportage justement au Viet Nam à propos de cette méthode ; l’enseignant rentre dans la salle de cours, tous les enfants se lèvent, en silence, avec respect… On a tout compris…

  5. Cher Jean-Michel, Merci pour ce tour d’horizon, l’enseignement des sciences en particulier est sinistré en primaire et au collège. Un élève de 4ieme en sait moins en santé, prévention des maladies, Pasteur, et leçon de choses qu’un élève de primaire à la libération. On le paye maintenant avec le vaccin et le complotisme. Pour le calcul c’est catastrophique, il faut aller dans les écoles privées, il n’y a pas malheureusement pas d’autre solution à l’heure actuelle.
    Bonne année quand même et comme tu le dis le fait que les 10% meilleurs sont maintenant impactés va peut-être faire réagir.
    Pomerol

  6. Merci Jean-Michel pour cette belle analyse de début d’année! Je voudrai ajouter que la formation des enseignants est effectivement le problème et on le sait bien. Deux raisons à cela: D’abord la formation initiale est pilotée par l’aval, c’est-à-dire les concours et comme ceux-ci sont essentiellement académiques, la formation (faite aussi par les universitaires) l’est aussi. Jospin avait introduit en 1989 une épreuve professionnelle, que Bayrou s’est empressé de supprimer pour faire plaisir à la FSU…Sur ce point, les candidats étant recrutés au niveau du master, il faudrait s’orienter vers des épreuves professionnelles et des entretiens d’embauche -ce qui suppose une profonde évolution des mentalités. D’autre part, la formation continue est volontaire et réalisée presque exclusivement sur le temps de classe des enseignants -d’où difficultés et inefficacité. Là aussi il faudrait s’orienter vers l’utilisation des vacances scolaires (ce que commence à faire Blanquer) et une quasi-obligation (en liant celle-ci à l’avancement par exemple). Vaste programme…
    Bernard Toulemonde

  7. J’ai écrit en 2010 en collaboration avec Antoine Bodin un livre « Le Krach éducatif, 32 moyens de tenter de l’éviter » (l’Harmattan) qui prévoyait un effondrement sur la base d’une analyse plus profonde, incluant une critique de l’unicité du « Collège Unique ». Je crois qu’il n’est pas possible d’avoir une réflexion intéressante sur le système éducatif français si l’on n’a pas idée de ce qu’est le quotidien d’un professeur de mathématiques dans un collège ordinaire. Un collègue d’enseignement professionnel me disait « nous récupérons des jeunes qui ont derrière eux quatre ans de radiateur ». Sans une nette revalorisation des enseignements techniques et professionnels, et une large ouverture, valorisée, de filières pratiques, techniques dès la classe de cinquième, l’effondrement ne peut que se poursuivre allègrement. Je prend le pari que les résultats en langue maternelle ne seront pas meilleurs.

  8. Merci Jean-Michel pour cette contribution à un débat plus qu’important. Je n’ai pas de compétence particulière sur le sujet et ai interrogé un ami prof de maths, non dans un collège lambda mais dans un collège oméga selon son expression…
    Il conteste le fait que le programme soit fait pour lycée, université… X, en me disant que celui de 6ème n’est qu’une reprise de celui du CM2.
    Il est en outre choqué des propos indiquant que les enseignants font moins l’effort face aux classes difficiles. Sa pratique, et celle de ses collègues, est au contraire que tous les efforts sont concentrés sur les plus faibles, en premier lieu au détriment des moyens, voire des forts.
    Son analyse, là encore partagée dans son collège, est que le tryptique compétences transversales/numérique/bienveillance constitue au contraire un facteur explicatif des manquements que tu signales. Car tout cela se fait au détriment des efforts qui doivent être faits par chaque élève, au profit d’une démagogie rampante sur le thème du « pas de vague ».
    En reprenant un point de vue personnel, je partage évidemment le fait que nous avons du mal à dire dans notre système que quelque chose est bien. J’ai mis personnellement tant d’années à le faire, puisque c’est ma troisième doctorante qui m’a fait prendre conscience du problème !
    Il me semble qu’un point essentiel est à signaler. Comme l’indique un commentaire sur Singapour, quand un professeur entre les élèves se lèvent.
    Il ne s’agit pas de chercher à retrouver un passé révolu… je ne suis pas habitué à regarder derrière !
    Mais la question du statut de l’école de la République, de l’enseignant au service de cette cause éducative si importante, me semble nettement plus fondamentale que celle de la formation des enseignants.
    Le professeur n’est plus maître dans sa classe, mis en cause par sa hiérarchie, les familles, voire les élèves eux-mêmes.
    On en a vu récemment les effets tragiques.
    Je suis conscient que tout cela est très difficile à appréhender, dans un monde bouleversé par l’accès à l’information.
    Mais prenons le temps d’analyser la situation, en premier lieu en associant les enseignants eux-mêmes, y compris et surtout ceux des collèges oméga.

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