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Les médias ont largement relayé l’appel d’enseignants-chercheurs de Lille, annonçant le 29 mars qu’ils refusaient de faire « le sale boulot de classement » demandé par la nouvelle procédure Parcoursup, la jugeant « chronophage » et « discriminant ».  Ou encore l’appel des « 400 » universitaires affirmant refuser la loi ORE parce ce que sélective. Pourquoi les prises de positions inverses d’universitaires sont-elles peu relayées ? Question de timing.

Depuis quelques jours, des appels d’universitaires fleurissent soutenant la réforme ou tout du moins dénonçant les blocages. Il y a celui de vice-présidents d’université sur France Info, celui de la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de l’Université de Lille ou comme à Toulouse Jean-Jaurès cette pétition « L’ut2j mérite mieux que ça » (s’attirant d’ailleurs immédiatement une riposte en ligne).

Il est frappant de constater le peu d’échos médiatiques de ces initiatives, pour le moment. Pourquoi ? La logique médiatique a son propre rythme (les images des blocages) et impose d’occuper le terrain, d’anticiper, ce que les anti-Loi ORE et/ou bloqueurs ont parfaitement maîtrisé. En un mot, ils ont eu un coup d’avance. Et ces pétitions sont moins « lisibles » et percutantes que celles des militants aguerris qui ont saturé l’espace médiatique avec des accroches fortes. La « punchline », puisque l’on dit comme ça désormais,« une sélection absurde » avec un texte court porte plus que « communiqué de XXX » ! Mais ce n’est pas un scoop : les universitaires ont du mal avec la communication, les militants non.

Stratégie défensive

Et puis, la communication pro Loi ORE n’a pas, c’est le moins que l’on puisse dire, été portée par la partie de la communauté universitaire favorable au projet. On revient là toujours au même problème qui mine l’université française : un rapport distant à son propre établissement, un individualisme assumé, la peur de fâcher les « chers collègues », voire la peur de passer pour un traître, surtout en ces périodes de commémoration de mai 68. Si l’on y ajoute des présidents d’universités devant composer avec des CA parfois partagés, voire hostiles à la réforme, on a les ingrédients d’une stratégie défensive dont les effets sont dévastateurs pour l’image de l’université dans on ensemble.

Les premiers à dégainer ont donc été les opposants à la loi ORE (ce qui est somme toute logique !) mais dans un contexte d’impréparation dans lequel l’information interne passe mal, quand elle existe. Certes, les établissements ont expliqué la procédure Parcoursup, par ailleurs décidée par le MESRI. Mais « l’information » a été portée par des réseaux formels ou informels, pas par l’institution. S’il existe évidemment des tentatives intéressantes (Cf. l’initiative de l’université de Lorraine), la clé reste l’information des enseignants-chercheurs eux-mêmes, un défi pas simple dans un contexte de débats où la polémique prend le dessus sur les échanges.

Quelles leçons en tirer ?

On a donc, d’un côté des réseaux organisés avec les syndicats ou encore des associations très actives comme l’Ases, de l’autre des présidents et leurs équipes, et parfois des individualités qui essaient d’entraîner timidement leurs collègues. Ajoutons que, l’immense majorité des universités, facultés et sites n’ayant pas été touchée par ce mouvement, les plus activistes ont pu dérouler leurs arguments sans le contrepoint de « collègues » … peu concernés. Résultat, on a pu avoir l’impression médiatique d’un soutien des enseignants-chercheurs au mouvement actuel, ce qu’évidemment rien n’atteste.

Parce qu’il est très difficile de « rattraper » la diffusion d’informations erronées, imprécises ou malveillantes, les stratégies d’information des établissements requièrent de s’inscrire dans la durée, sous peine de ne pas être audible. Et le « timing » de la communication est fondamental ce qui suppose de s’adapter très rapidement.

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