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Les mouvements en cours dans les universités, et qui ternissent dans l’opinion publique leur image, vont-ils avoir des conséquences sur leur attractivité ? L’enseignement supérieur privé est déjà en train de capter l’essentiel de la croissance tandis que le nombre d’étudiants étrangers progresse essentiellement hors universités. Mais surtout, indicateur majeur pour ces dernières qui en ont un quasi monopole, le nombre de doctorants étrangers diminue. Et quand le rapport Villani propose de doubler les salaires d’entrée dans la recherche publique, la réponse des pouvoirs publics est de créer, une fois de plus, des structures…

La part des étudiants inscrits dans les universités est désormais de 62% des effectifs de l’enseignement supérieur, après avoir atteint son pic en 1970 avec 77,7%. Et la croissance des inscrits dans l’ESR se fait désormais essentiellement au profit du privé. Si l’on y ajoute les chiffres alarmants de Campus France sur l’attractivité on peut s’inquiéter sur un système qui semble à bout de souffle. Une note d’avril 2017 du MESRI relève que le secteur privé rassemble 1 étudiant sur 6. Surtout, alors que les effectifs totaux de l’ESR ont progressé de 14 %  depuis 2000,  ceux de l’enseignement supérieur privé ont cru de 58 %. En un mot, l’université française n’est plus leader de la progression des effectifs et ne tire plus l’ensemble du système.

Dans le même temps, la situation de l’attractivité des étudiants étrangers tend à confirmer cette tendance : en 2005, la France accueillait 9,3 % des étudiants mobiles, chiffre tombé à 7,6% en 2010 et 6,7 % en 2015 (- 2,6 points en 10 ans). Conclusion de Campus France : “avec une progression 2,5 fois moins rapide sur la même période (+8,7%), la France perd progressivement des parts sur le marché mondial de la mobilité.” Et encore une fois, la croissance se fait hors université : elles n’attirent plus que 71% des étudiants étrangers en France (contre 76,2 % en 2011).

Complexification du paysage ou investissement dans le capital humain ?

Ces 2 tendances (générale pour les effectifs, spécifiques pour les étudiants étrangers) ne peuvent manquer d’interpeller. Elles pourraient cependant simplement indiquer que les universités se recentrent non sur le nombre mais sur le “haut de gamme”. Mais les chiffres des doctorants étrangers infirment cette analyse.
De 2012-2013 à 2016-2017, les effectifs baissent ! Certes, avec 41% de doctorants étrangers, la France est 4è dans le monde, devant les USA. Mais en 4 ans les effectifs chutent de 7,5%, avec des baisses significatives de 18,5% en Droit et Sciences Politiques, 13,4% en économie et 11,2% en Lettres et SHS ! Les sciences résistent mieux (-0,7%) mais illustrent la difficulté qu’a notre pays à retenir ou attirer les talents.
Les difficultés des SHS en général ne sont pas du même ordre que pour les sciences dures comme j’ai essayé de l’analyser. Mais globalement la France semble décrocher comme elle est distancée d’ores et déjà dans sa politique de rémunération des chercheurs.
De ce point de vue, le rapport Villani est très révélateur. La véritable mesure de rupture est simple : “un minimum de doublement des salaires de début de carrière est indispensable sous peine de voir se tarir définitivement le flux de jeunes prêts à s’investir dans l’ESR académique”. 
Cette proposition n’a bien sûr pas été retenue. Par contre, 1,5 Md€ devraient être consacrés à un plan pour l’intelligence artificielle avec la création de 4 à 6 instituts interdisciplinaires en intelligence artificielle.

Une fois de plus des structures et la complexification plutôt que le capital humain !

One Response to “Attractivité : 3 signaux inquiétants pour les universités”

  1. Pour qui voyageait un peu et circulait sur les campus étrangers, ce décrochage était hélas prévisible . Pour ma part cela fait une quinzaine d’annees que je perçois une évolution divergente entre notre système universitaire et les systèmes étrangers. Nos réformes n’y ont rien changé car elles sont incompréhensibles vues de l’exterieur. L’autonomie élargie par la loi LRU était déjà en retard par rapport à celle dont bénéficiaient déjà la plupart des universités étrangères ( l’EUA classe toujours au fond de son classement les universités françaises pour le niveau de leur autonomie). La loi de 2013 a créé des établissements dont le ministère lui-même ne sait même pas dire aux organismes internationaux qui font les rankings s’ils sont des universités!
    La situation est grave.

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