Surprise ce lundi 20 août à l’écoute des bulletins d’information de France Info et de FIP : je découvre qu’un rapport pointe la hausse du coût de la vie étudiante en cette rentrée et que près d’un étudiant sur deux est salarié. La source (Unef) est mentionnée à la fin, de façon anodine comme s’il s’agissait d’une étude incontestable, du genre statistique de l’Insee. L’occasion de revenir sur les « marronniers » à venir pour l’enseignement supérieur et le bénéfice que pourraient en tirer, avec un peu d’anticipation, les établissements.
A France Info et à FIP, comme sur BFM, on présente sans problème des opinions comme des faits, sans doute parce que le journaliste et son rédacteur en chef les partagent, mais plus probablement par paresse intellectuelle. Car une grande partie de la chaîne éditoriale fonctionne ainsi, quels que soient les sujets, par exemple les fake news sur la science.
Pour qui suit l’Unef (ou d’autres), les « marronniers » qu’ils essaient de vendre aux journalistes sont pourtant bien connus : en l’occurrence, l’Unef, disparue des radars médiatiques, a joué un coup d’avance, en période de creux, autour de la hausse du coût de la vie. Les années passées, c’était sur les droits d’inscription illégaux ou encore la défense de la LMDE.
Attardons-nous sur ce dernier aspect, non pour critiquer l’Unef mais plutôt la complaisance des médias : ces derniers avaient relayé sans barguigner une opération d’influence, reprenant des informations totalement fausses sur l’aggravation de l’état de santé des étudiants. Bon, les mutuelles concurrentes faisaient de même ?.
Heureusement, nous aurons dans le service public de grands appels sur la liberté de la presse menacée ou sur la nécessité de « refonder » le métier de journaliste. Et des proclamations grandiloquentes sur la différence avec BFM.
Pour le travail de base qui est de sourcer l’information, de la vérifier et d’éventuellement d’utiliser le conditionnel, on repassera. Ainsi la rédaction de France Info n’a même pas vérifié que les chiffres affichés par l’Unef elle-même…étaient inférieurs au chiffre de l’inflation.
Le conditionnel est-il d’ailleurs encore enseigné dans les écoles de journalisme ? Car dire « un étudiant sur deux travaille pendant ses études », ce n’est pas la même chose que « un étudiant sur deux travaillerait pendant ses études selon l’Unef »... Rappelons au passage les enquêtes de l’OVE, évidemment plus nuancées et bien mieux argumentées.
La leçon, détestable, c’est que l’on peut « vendre » sans difficulté à une partie des médias des sujets, comme je l’avais expliqué dans un billet Les témoignages “téléguidés” d’étudiants à la télévision : le pourquoi du comment.
Préparez vos marronniers
La rentrée s’annonce donc avec son cortège de « marronniers », sur tous les sujets. Ils sont dans le métier de journaliste ce que les figures imposées sont au patinage artistique. Incontournables, l’essentiel n’est-il pas qu’ils soient bien traités ? Bon, je ne cache pas le fait que les Comue ne seront pas les têtes de gondole des médias en cette rentrée.
Donc nous allons avoir concernant l’enseignement supérieur (Parcoursup n’est, pas encore, un marronnier !) le logement étudiant, la précarité au titre des sujets qui font pleurer dans les chaumières, et pour ce qui fait sourire et rend optimiste, l’apport sous toutes ses formes du numérique par exemple. Bon là il s’agit d’un raccourci concernant surtout des radios et télés, pas des journalistes spécialisés.
Les médias, en fonction de leurs lecteurs, seront preneurs de tel ou tel aspect novateur : des journalistes chercheront donc heureusement à sortir des sentiers battus, même s’ils doivent convaincre leur rédaction en chef. Il existe donc des figures libres.
Je fais donc un rêve : toutes les universités ont préparé des idées de sujet sur ces pépites qui font la différence et ont désormais un plan média, comme le font les organisations syndicales étudiantes.
Car c’est aux établissements d’élaborer une stratégie gagnante tant pour eux-mêmes que pour le ou les médias.
La non-vérification des sources, les marronniers, le fait que certains journalistes omettent d’employer le conditionnel : tout cela est connu et archi connu. Votre billet n’apporte rien. Vous ne proposez aucune piste de réflexion.
Quant aux marronniers, ceux-ci font partie de l’exercice journalistique mais ne résument pas le métier de journaliste. D’autant plus que les lecteurs/téléspectateurs attendent que l’on parle de ces marronniers comme la rentrée, noël.. Des sujets qui les concernent et les touchent directement.
Le problème de fond est cette course à l’info et de proposer des sujets non fouillés. Parler au conditionnel ne relève pas d’une difficulté particulière comme vous le prétendez. Le plus dur est de proposer d’autres angles de reportages que ses confrères journalistes, d’autres sujets dont on nous rabâche les oreilles toutes la journée. Bref, sortir des sentiers battus et prendre le temps de la réflexion. Et ce n’est pas vraiment gagner !
Bonjour, je ne suis pas spécialisé dans la critique des médias mais dans l’ESR : c’est dans ce cadre que je reviens sur l’usage du conditionnel, non pas au sens simplement grammatical, mais des sources. Quant aux marronniers, je dis la même chose que vous : simplement sortir des sentiers battus, c’est faire aussi que les universités soient proactives et imaginatives. Car elles sont symboliquement dévalorisées dans la société française.
Bonjour
Je n’ai pas l’impression que l’art du conditionnel soit inconnu de façon générale chez les journalistes. Je trouve au contraire qu’il y a bien trop d’articles écrits au conditionnel. Je ne sais pas s’il y en a plus ou moins qu’avant, mais il y en a trop de toutes façons.
Or c’est aussi une solution de facilité ; une façon un peu hypocrite de lancer des rumeurs, etc.
Le vrai travail journalistique me semble être d’écrire à l’indicatif, mais après avoir vérifié non seulement les sources, mais les informations elles-mêmes, par comparaison, croisement, etc.
Ceci dit, le défaut n’est pas seulement journalistique. Je me souviens de la lecture d’un livre d’une politologue du CNRS, désormais retraitée, sur « toutes les mafias » en Russie, dans lequel de nombreux passages étaient écrits au conditionnel (« il se dirait même à Moscou qu’il y aurait, etc. »). Le conditionnel c’est pratique. Ça permet de ne pas trop vérifier voire de faire fonctionner son imagination et d’en écrire des livres et des articles !
Bien à vous
Oui d’accord avec vous, mais je parlais du conditionnel aussi et surtout au niveau des sources !