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Alors que les groupes de travail s’activent sur la loi de programmation pluriannuelle de la recherche, il est toujours utile d’interroger le passé. En l’occurrence un passé assez récent, celui des États généraux de la recherche qui durèrent de mars à novembre 2004, marqués par la démission de centaines de directeurs de laboratoires. Ce mouvement annonça la dernière loi de programmation en 2006. Quelles étaient les propositions de 2004 ?

Si la loi de 2006 n’a pas suivi à la lettre ?, les propositions des états généraux de la recherche, conclus en novembre 2004 à Grenoble, on trouve parmi ses propositions des débats toujours d’actualité

Rappelons-donc les 7 propositions émises à cette occasion.

Réaffirmer et compléter les missions de la recherche publique. Il s’agit d’abord de l’élaboration et de la diffusion des connaissances scientifiques, ensuite la formation à et par la recherche, enfin la valorisation des connaissances scientifiques. Les rédacteurs y ajoutent l’expertise, une vision prémonitoire au vu des débats sociétaux actuels et des fake news.

Mais peut-on s’empêcher de penser (car rien n’a changé en 2019), que les belles âmes qui prônent la diffusion des connaissances scientifiques pourraient commencer, par exemple, par enseigner en L1 ? ?

Donner les moyens nécessaires à l’accomplissement de l’ensemble de ses missions. Le rapport propose, déjà, d’augmenter de 1Md€ par an les moyens consacrés à la recherche.

Mettre en place les structures permettant le développement d’une recherche prioritaire. Il est demandé la création d’un Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de la technologie (oui on ne parlait pas vraiment d’innovation à l’époque). La création d’un ministère de plein exercice change-t-elle vraiment la donne puisque de toutes façons l’ESR est rarement une priorité ?

Un Haut Conseil de la Science (HCS), composé majoritairement de scientifiques, serait placé auprès de l’autorité publique, ainsi qu’un Comité d’évaluation des opérateurs de recherche (CEOR). Est-ce un hasard si le HCS (peu importe le nom) demeure l’Arlésienne des politiques publiques ? Quant au CEOR, l’Aeres puis le Hceres ont été, quels que soient leurs défauts, une réponse moins limitative, en reliant enseignement supérieur et recherche.

Renforcer les établissements d’enseignement supérieur et de recherche, et favoriser leur coordination. Parce que « les universités ont vocation à jouer un rôle plus important dans le dispositif de recherche français », il faut une « réforme profonde de leur fonctionnement » ainsi qu’un « rapprochement des universités et des grandes écoles ».

Si les changements sont importants et réels dans les universités, le rapprochement avec les grandes écoles reste un chantier dont on ne voit franchement pas le bout.

Il faut repenser « le nombre et le contour des organismes de recherche » mais en attendant, il faut « mettre en place une coordination étroite des organismes, impliquant notamment des programmes communs. » La dimension territoriale de la recherche est assurée quant à elle « par des PRES ». Les Alliances de recherche semblent avoir été la réponse, avec une efficacité diverse et limitée. Quant aux contours, la fusion Inra-Irstea augure-t-elle d’une prise de conscience ? On en doute lorsque l’on voit les chevauchements entre organismes qui n’ont pas bougé !

Placer la dynamique propre de la recherche au centre de la politique scientifique nationale. Il est nécessaire d’en finir avec la « lourdeur des mécanismes de gestion » tandis qu’est proposée la mise en place d’une « dotation de base pour 4/5 ans à chaque structure de recherche., dont le niveau sera déterminé à partir d’une évaluation rigoureuse du projet scientifique. » Tiens, déjà le débat sur les crédits de base !

Quant à l’évaluation des chercheurs, elle sera « systématiquement et régulièrement effectuée au niveau national pour des périodes de 4/5 ans. »  La gestion, ou non, du niveau national reste en 2019 une pierre d’achoppement.

Enfin, « une nouvelle structure fédérant les opérateurs et dotée d’un budget propre » sera créée, le Comité de financement des projets scientifiques. Ce sera l’ancêtre théorique de l’ANR, créée dès 2005.

Réaffirmer le rôle central des personnels de la recherche dans le dispositif national

Outre un plan pluriannuel de l’emploi scientifique (le déficit important de Biatss et ITA est souligné), la préparation de la thèse devra être le cadre du 1er emploi en CDD, tandis que pour les Post doc, il sera nécessaire de définir « un statut de chercheur ou chercheur associé ». Et « le recrutement sur des postes stables doit être effectué majoritairement dans les 6 ans après le début de la thèse ». Une esquisse de tenure track ?

Tout « en reconnaissant leur complémentarité », il faudra « favoriser les passerelles entre les différents métiers, chercheurs, enseignant-chercheur et ingénieurs ». Point de statut unique ! Mais l’idée de carrières plus fluides : à propos des enseignants-chercheurs et la recherche, le rapport souligne la nécessité d’améliorer les conditions avec des décharges d’enseignement pour les jeunes Maîtres de conférences.

Intégrer la politique nationale de recherche dans une perspective européenne

Les vœux d’augmentation des budgets recherche (PCRD et H2020) ont été exaucés, de même que sur les ERC. Et déjà l’objectif des 3% du PIB…Un mirage ?

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