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Difficile de ne pas aborder la crise sociale et politique à laquelle nous assistons. Je n’ai pas vocation sur mon blog à décrypter l’actualité générale, qu’elle soit politique sociale, culturelle voire sportive. Si j’évoque les conséquences pour l’ESR de la crise actuelle, il me semble opportun et important de se préparer à quelque chose de plus grave : l’arrivée du RN au pouvoir. Avec une hypothèse plausible : son gouvernement “à l’italienne” regarderait l’Université française s’enfoncer dans ses querelles intestines pour laisser le fruit pourrir. Science fiction ? Je l’espère.

Tout d’abord, étant incapable d’évaluer les conséquences concrètes de la réforme des retraites sur le secteur de l’ESR, et n’écrivant que sur les sujets que je maîtrise un minimum, je ne les évoquerai pas. Je reviens par contre sur le contexte et les conséquences politiques.

L’annonce de la réforme des bourses revêt une importance politique particulière : sans cesse retardée, elle est très attendue 1Le Cnous a été contraint de retarder la mise en service des dossier à remplir…. On peut imaginer qu’E. Borne et/ou E. Macron monteront au créneau pour la rendre visible car de l’argent sera mis sur la table. Mais le risque, comme d’habitude, est qu’il n’y ait pas de réforme de fond, trop explosive et surtout trop tardive.

En période de mouvement social, le souhaitant ou le craignant, toutes les forces politiques font de l’ESR un enjeu politique. Côté gouvernement, la réévaluation des bourses sera présenté comme un pas en avant (ce qui sera vrai), tandis que les syndicats étudiants  la jugeront insuffisante 😉.

C’est une constante de la politique française : ses dirigeants, de quelque bord qu’ils/elles soient, instrumentaliseront ce qui est en réalité un cautère sur une jambe de bois. Alors même que les enjeux sont aussi importants en termes de conditions de vie que d’études, le débat va se polariser exclusivement sur les aides sociales.

Les conséquences de la tension sociale et politique

Dans cette situation, c’est peu de dire que les 4 années restantes du quinquennat d’E. Macron vont être compliquées. Évidemment dans le contexte actuel, aucune réforme autre que celle des bourses ne sera à l’ordre du jour, ce qui de toutes les façons n’était pas prévu… comme je l’avais souligné dès la nomination de S. Retailleau.

On peut faire confiance au ministère pour dégainer décrets, arrêtés et circulaires : pourquoi pas si cela va dans le bon sens, notamment pour simplifier ? Cependant, la ministre S. Retailleau qui n’est pas à proprement parler une ‘femme politique’, devra se mouvoir encore plus qu’avant dans un environnement où les couteaux sont sortis, y compris dans les arbitrages. Et malheureusement, durant les 4 ans qui viennent, il est plus que probable (j’espère avoir tort !) que la non-priorité politique de l’ESR s’ancre un peu plus, accentuant le décrochage de la France (Cf. mon billet.)

Le ministère devra donc être le gestionnaire plus ou moins efficace de l’existant (Parcoursup, LPR, France 2030). Le gros morceau, outre la simplification en cours de la LPR, ce seront les fameux contrats d’objectifs de moyens et de performance (COMP), vu de loin par les communautés. Car, comme les Français et les Françaises, ils jugeront à l’aune de l’exécution.

Mais le véritable sujet pour l’ESR est-il là ?

Se préparer à l’arrivée du RN au pouvoir

Le microcosme bruisse de rumeurs : remaniement, nouvelles alliances, dissolution voire démission. Ce qui est certain, c’est que notre pays est divisé en 3 tiers, pas forcément égaux 😒. Ces 3 tiers ont besoin de points d’appuis pour un élargissement de leur assise afin de gouverner : le RN cherche à absorber la droite, qui ne sait plus où elle habite, le centre cherche lui aussi une alliance à droite sur les dépouilles de LR, tandis que la Nupes n’a pas, ou peu, de marges sur des alliances, minée elle aussi par ses divisions (Cf. la législative de ce dimanche en Ariège).

Dans ce contexte, je partage l’analyse des politologues sérieux (surtout moi 🤭 !) à partir de ce que l’on observe depuis des années : l’arrivée au pouvoir du RN, si elle n’est pas certaine, est de plus en plus plausible.

Hypothèse farfelue il y a quelques temps, malgré des signaux alarmants, le débat sur les retraites a scellé la fin de sa mise en quarantaine, et sa ‘notabilisation’. Les Plick et Plock de la politique, J-L Mélenchon et E. Macron, ont ouvert un boulevard, que dis-je une autoroute au RN, avec la complaisance de médias qui ont perdu tout repère déontologique en hystérisant tout ce qui passait à portée de main.

Il paraît très improbable que la Nupes obtienne une majorité à des élections législatives. Elle serait de toutes les façons confrontée à des divisions encore plus fortes. L’impopularité actuelle du Président de la République rappelle quant à elle le toboggan sur lequel a glissé F. Hollande, dont son camp sera la victime expiatoire. Donc, l’hypothèse la plus probable, malheureusement, est celle, tôt ou tard, d’un gouvernement “à l’italienne” coalisant RN et une partie de LR.

Et il n’y a aucune raison que le secteur de l’ESR soit étanche aux glissements d’opinion auxquels on assiste. Si les différentes communautés ne sont pas touchées de la même manière, les études d’opinion le montrent : les étudiants, et la jeunesse en général, ne sont pas imperméables aux idées du RN. Arrêtons d’idéaliser !

L’hypothèse du “fruit pourri”

Donc l’ESR doit se préparer à cet événement inimaginable il y a peu. La première hypothèse, c’est que les sujets qui vont passionner une alliance RN-LR seront le wokisme supposé des universités, le port du voile, la préférence nationale et la “loyauté” des responsables de l’administration, sans parler de celle des opérateurs. Et c’est là que l’on verra la différence entre un gouvernement accusé de tous les maux et la réalité de l’illibéralisme. Et cela reposerait la question de l’autonomie des universités dans d’autres termes.

Mais on peut faire aussi une hypothèse plus vraisemblable, qui n’exclut pas la première : face à un ESR paralysé par ses luttes intestines (disciplines, statuts 2Une partie de ses leaders d’opinion, sur les réseaux sociaux ou ailleurs, a choisi de singer Staline. Ce dernier avait en 1931 décidé que l’ennemi principal était le SPD. Le dirigeant du PC allemand (KPD) E. Thaëlmann affirmait que “les arbres nazis cachent la forêt social-démocrate”: arrêté en 1933, exécuté en 1944 à Buchenwald. Pas par le SPD… Remplaçons SPD par partis démocratiques… etc.) ce gouvernement RN élargi laissera surtout le fruit tomber … et pourrir. Au profit par exemple de l’enseignement supérieur privé, et pas le meilleur. C’est une hypothèse plausible pour une raison simple : le programme du RN sur l’ESR est famélique. Pourquoi s’emm… ?

Laissez les loups (plutôt parfois des chiens errants…) se manger entre eux ? La communauté universitaire en est bien capable malheureusement. Il reste 4 ans au mieux… J’espère avoir tort.


A propos de la “mobilisation étudiante”

Mon propos n’est pas d’expliquer une déconnexion des étudiants par rapport aux préoccupations et oppositions des Français : j’imagine que sur le sujet des retraites, ils/elles les partagent ! Mais force est de constater, que non seulement ils ne sont pas l’étincelle attendue par certains, mais qu’en plus le raz de marée fantasmé n’est pas là. En témoignent les communiqués des organisations elles mêmes. Il faut relever à mon sens le plus important : quels que soient les développements futurs, aucune revendication “corpo” n’émerge sur leurs études.

D’abord, remarquons une chose : comme je l’ai maintes fois souligné, le ‘monde étudiant’, au grand dam de celles et ceux qui rêvent d’un nouveau Mai 68, n’est plus ce qu’il a été. Moins socialement monolithique, beaucoup plus diversifié géographiquement (une seule fac de médecine à Paris en 68 !), très éclaté pédagogiquement (stages etc.), il n’est plus ce dentifrice libéré lorsque l’on appuie trop fort et que l’on n’arrive plus à faire rentrer. Et même le dentifrice lycéen ne sort pas beaucoup.

Ensuite, il est intéressant de se pencher sur la communication des organisation étudiantes qui ne parlent désormais quasiment plus de grève mais de blocage, et mélangent étudiants et lycéens dans leurs chiffres. Traduit en langage réel, cela signifie une action militante de petits groupes : à quelques exceptions près, les leaders médiatisés sont la plupart du temps issus de ce que j’appelle la petite bourgeoisie déclassée et radicalisée, souvent en SHS et localisée dans quelques établissements et encore (Tolbiac n’est pas Paris-I).

A ce jour aucune réforme ne cristallise des mécontentements : les lycéens préparent le bac et surtout leurs vœux sur Parcoursup tandis que les étudiants ont en face d’eux non pas un gouvernement et une mesure uniforme mais des chefs d’établissements plus ou moins autonomes (contrairement aux réformes ‘Top down’ de l’éducation nationale).

Références

Références
1 Le Cnous a été contraint de retarder la mise en service des dossier à remplir…
2 Une partie de ses leaders d’opinion, sur les réseaux sociaux ou ailleurs, a choisi de singer Staline. Ce dernier avait en 1931 décidé que l’ennemi principal était le SPD. Le dirigeant du PC allemand (KPD) E. Thaëlmann affirmait que “les arbres nazis cachent la forêt social-démocrate”: arrêté en 1933, exécuté en 1944 à Buchenwald. Pas par le SPD… Remplaçons SPD par partis démocratiques…

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